Monsieur le Président du CHSCT ministériel,
Ce CHSCT ministériel se tient aujourd’hui, 3 décembre, après le boycott légitime par nos organisations syndicales de celui initialement prévu le 13 novembre. Légitime car nous continuons de penser que 3 heures pour traiter 2 sujets majeurs tels que la crise sanitaire et la situation dans les abattoirs, c’est bien trop peu ! Légitime car nous refuserons toujours de laisser la place d’un CHSCT ministériel à un groupe de travail. Ce serait à la fois mépriser ses prérogatives et mépriser la représentation des personnels.
Nous voulons rappeler ici encore une fois notre attachement à cette instance, seule capable de traiter réglementairement des sujets de santé, de sécurité et de conditions de travail. Malheureusement la crise sanitaire perdure. Il est donc essentiel que le CHSCT ministériel continue à mettre tout en œuvre pour protéger les agent.es du ministère de l’agriculture.
Dans l’enseignement :
De trop nombreux dysfonctionnements perdurent. Nous demandons expressément que ces sujets soient traités aujourd’hui. En effet, le protocole dit « renforcé » – trop peu cadré et injonctif – ainsi que la réduction de la jauge dans les EPLEFPA sont encore très inégalement appliqués favorisant ainsi des dérives locales dangereuses pour la santé des usagers. Certains établissements sont tentés de reprendre un fonctionnement classique sans réduction de jauge alors même que rien n’indique que cela doit se faire, puisque le gouvernement a établi la date du 20 janvier pour faire le point sur la situation sanitaire.
Une campagne de dépistage par tests antigéniques a été annoncée dans l’Éducation. Il importe désormais de déployer un véritable plan de dépistage avec des moyens techniques et humains supplémentaires.
Le télétravail n’est pas une simple option, comme le rappelle régulièrement le gouvernement. S’il est la règle en administration centrale, il est insignifiant dans les EPLEFPA. De nombreu.ses agent.es voient leurs demandes refusées pour des motifs contestables et ne comprennent pas pourquoi il est appliqué à certain.es et pas à d’autres.
De manière générale :
- le jour de carence reste en vigueur alors qu’il avait été supprimé au printemps dernier dans le même contexte épidémqiue. C’est une régression injuste des acquis sociaux pour tou.tes les salarié.es ;
- Le tableau récapitulant la position administrative des agent.es fait l’impasse sur le cas des personnels vivant avec une personne vulnérable. Nous regrettons vivement que ces agent.es ne puissent être placé.es en ASA, dès lors que leurs missions ne sont pas télétravaillables ;
- le fonctionnement de cette instance est plus que problématique. La diffusion hors délai des procès verbaux et des réponses aux avis, la présente reconvocation à la suite d’un défaut de quorum, hors délais également, constituent une entrave au bon fonctionnement de notre instance et à sa réactivité, pourtant essentielle, en période de crise sanitaire. Nous demandons le respect de la réglementation.
Dans les abattoirs, les dysfonctionnements sont tout aussi nombreux :
Covid-19 et abattoirs : Quels impacts sur la santé des agent.es et comment y remédier ?
Les abattoirs font partie des secteurs d’activité où la production n’a jamais cessé durant l’épidémie, y compris dans notre pays où le confinement a été décrété.
Cette épidémie a de lourdes conséquences sur la filière agroalimentaire mais également sur la santé des salarié.es, des agent.es des services de l’État concernés et de leurs proches.
Les services d’inspection en abattoirs sont particulièrement exposés à cette épidémie du fait de conditions de travail difficiles : cadences élevées, bruit, humidité, locaux vétustes et exigus et d’un manque d’effectif grandissant depuis de nombreuses années.
Conditions de travail en abattoirs :
-Les nuisances sonores
Habituellement, les nuisances sonores ne sont pas intégrées dans les conditions de travail du secteur de l’agroalimentaire. Pourtant le bruit est à l’origine de surdité, de dégradation de la santé tels que les troubles cardiaques, troubles du sommeil, troubles psycho-sociaux. Enfin, il génère de la fatigue. Le bruit peut également masquer certains signaux d’alerte et être à l’origine d’accidents. Les agents sont contraints à une communication et transmission d’informations entre les divers interlocuteurs, dans une proximité non compatible avec les mesures de prévention du risque Covid. De ce fait, cette situation induit des prises de risque accrues à la contamination par le virus. Il est donc urgent de prendre des mesures de lutte en la matière ! Lors de l’enquête réalisée par la FSU de cet été sur la Covid-19 en abattoir, 83% des agents déclarent éprouver des difficultés pour communiquer en raison du bruit.
L’INRS estime que pour un travail demandant de la concentration – ce qui est le cas pour l’inspection sur chaine -, le bruit ne doit pas dépasser 50db. Il est évident que cette valeur n’est pas respectée dans les abattoirs !
En premier lieu, la FSU, FO Agriculture et la CGT demandent que sur les abattoirs disposant de relevés de bruit depuis moins de 3 ans, des mesures d’affaiblissement acoustique collectives soit mises en œuvre rapidement (capotage des machines bruyantes, pièges à bruit au-dessus des postes de travail, suppression des contacts métal/métal en les remplaçant par des contacts métal/plastiques, suppression des sirènes d’avancement de chaîne etc). Sur les autres abattoirs, nous demandons la réalisation de relevé de bruit conformément à la réglementation du travail avec un échéancier très restreint dont nous demandons sa communication.
-La problématique des vitesses de chaines
Depuis une vingtaine d’années, les vitesses de chaîne ont considérablement augmenté allant jusqu’à 800 porcs/heure et 100 bovins/heure. Cette augmentation s’est traduite parallèlement par le développement des TMS chez les agents comme le démontre la thèse d’Amandine Gautier. Le ministère de l’agriculture a laissé faire cette dérive au détriment de la santé des agents alors que, par exemple, d’autres pays comme le Danemark ont limité ces vitesses de chaîne pour l’inspection à 400 porcs/heure. Par ailleurs, ces augmentations de vitesse de chaîne se sont produites la plupart du temps sans agrandissement des halls d’abattage. Au delà des conditions de travail dégradées, cette situation ne permet pas aujourd’hui de respecter les mesures de distanciation nécessaire à la prévention du risque covid.
Nous demandons que les chaines à forte cadence soient dédoublées ou ralenties, afin d’avoir des cadences correctes qui ne mettent pas danger la santé des agents avec des plafonds de 400 porcs/heure et 30 bovins/heures. De plus, ces cadences permettraient entre autres, de respecter les mesures de distanciation.
-Les locaux sociaux des services d’inspection
Pour la FSU, FO Agriculture et la CGT, notre Ministère doit faire pression sur les industriels afin que les agents affectés en abattoir disposent de locaux décents, permettant de respecter les mesures de prévention de la Covid-19, en se rapprochant de la norme de 9 m2 par agent.
L’enquête réalisée par la FSU fait apparaître que près de la moitié des agents jugent les locaux insatisfaisants du fait de leur taille. D’autre part, ces locaux sont trop souvent vieillissants et en mauvais état d’entretien.
Nous rappelons que le ministre dans son courrier aux abatteurs en date du 6 avril 2020 demande que « Les mesures d’hygiène et de distanciation sociale dites « barrières » puissent être observées en tout lieu et en toute circonstances ».
Nous demandons donc qu’un état des lieux de ces locaux commandité par la DGAL soit réalisé par les directions départementales en collaboration avec les représentants du personnel et le réseau des ISST pour la fin de l’année 2020.
Nous demandons également que le MAA fasse appliquer la NS 2013/8057 du 20 mars 2013 sur les protocoles cadres en abattoirs et notamment l’article 11 sur les locaux à usage administratif et technique réservés aux agents des services d’inspections. En effet, cet article prévoit que les abatteurs mettent à notre disposition des locaux « de surface suffisante ». Or ces surfaces ne permettent pas à l’heure actuelle de protéger les agents du virus et va donc à l’encontre des recommandations du Ministre.
Pour un plan de relance de l’amélioration des conditions de travail en abattoir !
Monsieur le Président, vous n’êtes pas sans savoir que le gouvernement provisionne 130 millions d’euros pour le plan de modernisation des abattoirs. Ce dernier a pour objectif l’amélioration des conditions de travail et la prise en compte de l’hygiène alimentaire et la protection animale. Toutefois, cette somme ne semble être mobilisée que partiellement aux nombreuses exigences concrètes et aux attentes des agents du service d’inspection, des salarié.es, des paysan.es et de la société civile. C’est pourquoi la CGT, FSU et FO Agriculture propose que :
- seuls soient éligibles à ce financement les investissements présentant en compte une amélioration des conditions de travail,
- la création et la modernisation des abattoirs fixes de proximité soient aussi accompagnées par un plan de modernisation, afin de relocaliser les outils d’abattage dans les zones où ils font défaut pour une limitation du transport d’animaux et la création d’emploi de proximité respectueux des hommes et de l’environnement.
Monsieur le Président, garantir la salubrité des denrées mises sur le marché pour nos concitoyens et l’approvisionnement nécessaire du pays sont essentiels mais cela ne doit en aucun cas mettre la santé de nos collègues en danger dans le cadre de leur mission de service public.
La CGT, FSU et FO Agriculture sont ainsi particulièrement attentives à l’utilisation des fonds du plan de relance pour les abattoirs car il y a urgence à améliorer les conditions de travail en abattoir – d’autant plus en cette période d’épidémie de Covid, nécessitant une protection accrue de la communauté de travail.
Pour illustrer les derniers dysfonctionnements, le dimanche 22 novembre 2020, nous avons appris par les médias qu’un élevage de visons avait été abattu suite à la confirmation d’infection des animaux par le SARS COV 2. Le risque suspecté dans cet élevage était la présence d’un virus muté transmissible de l’animal à l’homme, à l’instar de celui découvert au Danemark. Il y a un plan de surveillance, depuis mai dernier, dans les élevages de visons. Nous aimerions prendre connaissance des mesures de protection qui ont été mises en place pour nos collègues qui sont en première ligne pour cet abattage d’urgence ! Ces mesures de protection prenait-il en compte la protection des agent.es envers les médias et les associations de protection animale (surtout, au vu de la déferlante médiatique que cela a engendré dans les pays du Nord) ? Nous savons qu’il y a d’autres élevages sur le territoire. Est il prévu de faire un retex de cette expérience au cas où des collègues seraient amené.es à procéder à de nouveaux abattages en urgence ?
Monsieur le Président, la FSU, FO Agriculture et la CGT exigent une réponse favorable à leurs demandes pendant ce CHSCT-M exceptionnel sur le sujet des abattoirs et, avant la fin de l’année, d’être informées sur l’évolution de ce dossier et la bonne prise en compte de nos propositions. Nous ne tolérerons pas que les crédits du plan de relance servent à augmenter la productivité et les bénéfices de quelques grands groupes d’abattage, sans l’amélioration des conditions de travail des agents du MAA et des salarié.e.s d’abattoir.
Nous pourrions ainsi allonger la liste de ces situations. Le CHSCT-M émettra aujourd’hui, dans l’intérêt des conditions de travail des agents du MAA, ses préconisations, concrètes et constructives, à entendre et à valider. Il en va de la responsabilité du ministre.
Merci de votre attention.